Espèce

Le règne du con est arrivé depuis si longtemps qu’il ne cessera qu’avec l’espèce.

Un homme qui lit, ou qui pense, ou qui calcule, appartient à l’espèce et non au sexe ; dans ses meilleurs moments il échappe même à l’humain.

Qu’il est bien agréable de caresser un être de son espèce et d’un sexe différent du sien.

Le piéton est une espèce de microbe qui vit dans les artères et qui gêne la circulation.

On dirait que la douleur donne à certaines âmes une espèce de conscience. C’est comme aux huîtres le citron.

C’est une espèce de bonheur, de connaître jusqu’à quel point on doit être malheureux.

Les vocations de délateur abondent dans l’espèce humaine.

Le progrès matériel doit être lent, comme l’évolution des espèces. Sinon il produit des monstres.

A travers tous les trafics, manipulations ou transmutations génétiques de l’espèce, on est arrivé à un point de non-retour où l’on ne peut plus déterminer ce qui est humain ou non humain.

Biologiquement, l’espèce est la somme de toutes les expérimentations individuelles réussies depuis le commencement.

Les couples sont de quatre espèces : toi et moi égale toi, toi et moi égale moi, toi et moi égale nous, toi et moi égale toi et moi.

Vous n’avez jamais eu la tentation du suicide, vous ? Le fait n’est pas rare, il est même assez normal chez les nerveux de votre espèce.

Les méchants assurent qu’il n’existe que deux espèces de socialistes : ceux qui sont trop malins et ceux qui ne le sont pas assez.

L’homme veut la concorde, mais la nature sait mieux que lui ce qui est bon pour son espèce : elle veut la discorde.

L’homme est un animal qui du moment où il vit parmi d’autres individus de son espèce a besoin d’un maître. Or ce maître, à son tour, est tout comme lui un animal qui a besoin d’un maître.

Tous les amateurs, les critiques d’art sont tristes comme des gens hébétés par une espèce de masturbation morale.

Le vrai bonheur coûte peu ; s’il est cher, il n’est pas d’une bonne espèce.

Manier savamment une langue, c’est pratiquer une espèce de sorcellerie évocatoire.

Les femmes sont uniquement créées pour la propagation de l’espèce et toute leur vocation se concentre en ce point.

Depuis l’aube de la conscience jusqu’au milieu de notre siècle, l’homme a dû vivre avec la perspective de sa mort en tant qu’individu ; depuis Hiroshima, l’humanité doit vivre avec la perspective de son extinction en tant qu’espèce biologique.

L’esprit, mis en présence de toute espèce de difficulté, peut trouver une issue idéale dans l’absurde.

Il n’y a plus que les bibliophiles qui aient des bibliothèques, et l’on sait que cette espèce d’hommes ne lit jamais.